mardi 23 janvier 2018

Rencontre avec le cosmonaute Salizham Charipov




Salizham Charipov est un cosmonaute, originaire du Kirghizistan.

Pilote de chasse dans l’Armée de l’Air soviétique, il est sélectionné comme cosmonaute en 1990 (Groupe TsPK-11) et est déclaré cosmonaute à l’issue de son entraînement de base en 1992.

Salizham Charipov a effectué deux missions spatiales et a passé en tout 201 jours14 heures 49 minutes dans l’espace :

STS-89 : 23 au 31 janvier 1998
Expedition 10 : 14 octobre 2004 au 24 avril 2005

Il a été doublure sur Soyouz TM-29 / Soyouz TM-30 / STS-113 / Expedition 9 / Expedition 16


Entretien réalisé le 16 octobre 2017 lors du 30ème Congrès des astronautes de l’ASE (Association of Space Explorers) à la Cité de l’Espace à Toulouse.

Pourquoi avoir choisi d’être cosmonaute ? A quand remonte cette envie de devenir cosmonaute ?
Parce que c’est cool (Rires…) !

J’étais encore petit, 4 ou 5 ans, lorsqu'en me promenant avec ma mère, j’ai vu un avion voler très bas. Je me suis dis que moi aussi j’aimerai bien me balader dans les airs pour voir les gens se promener. J’ai donc travaillé dur, et je suis devenu pilote militaire. Et en étant pilote, je voulais aller de plus en plus haut, de plus en plus vite...
Et quand l’opportunité de postuler pour être cosmonaute s’est présentée, j’ai aussitôt fait une demande. Enfin pas moi, mais mon unité. C’est comme cela que l’on choisissait les candidats. L’armée choisit des candidats, et …

Sur quel(s) critère(s) ?
Le premier critère est d’avoir une grosse expérience de vol en tant que pilote de chasse. 
Je pilotais des Mig-21 et j’avais la chance d’avoir cette expérience de vol. 
Puis, une fois les noms transmis, il y a la commission médicale, une commission éducation, etc… plein de commissions et pleins de tests et entretiens. Je crois que cela m’a pris plusieurs mois pour arriver à la dernière manche de cette sélection.
J’ai travaillé dur pour être sélectionné et je devais travailler aussi dur pour finir ma formation (ndlr : sélectionné en 1990 et fin d’entraînement en 1992).

Pour être cosmonaute, il faut travailler dur, et avoir aussi de la chance, être là au bon moment, avoir la forme au bon moment, avoir des étoiles chanceuses au bon moment !

Vous avez effectué votre premier vol spatial, il y a presque 20 ans, c’était STS-89, en direction de la station MIR. Dans quel état d’esprit étiez-vous avant le décollage ? Comment s’est passé celui-ci ?
J’étais très concentré mais j’attendais le décollage avec impatience !
J’étais très content de décoller même si on a eu un peu peur que le décollage soit reporté à cause du temps. Je m’étais préparé pour ce décollage, mais le vivre en vrai était vraiment une expérience extraordinaire !

(Arrivée de Salizham Charipov au KSC pour le décollage de STS-89)


Quelles ont été vos premières pensées une fois dans l’espace ? L’apesanteur, c’est comment ?
J’attendais cela avec impatience ! 
Dès le décollage, je guettais ce moment dans un coin de ma tête, j’étais concentré. 
J’étais dans le mid-deck et il n’y a pas de fenêtres… je me concentrais donc sur les bruits qui me rapprochaient de la mise en orbite : bruits de séparation de boosters, bruit de séparation du réservoir externe… et plus rien… nous étions en gravité zéro !

J’ai trouvé cela formidable mais je n’ai pas eu réellement le temps d’y penser sur le moment. J’avais réalisé mon rêve, et j’étais très heureux !
Puis, il y avait beaucoup de travail qui nous attendait, ce qui laisse peu de place aux sentiments personnels.

(STS-89 est l'avant-dernière mission d'arrimage d'une navette avec la station MIR)

Pouvez-vous justement nous parler un peu de votre travail dans la navette lors de votre premier vol spatial ?
Ce premier vol était une courte mission (ndlr = presque 9 jours) et a donc été très intense. 
Nous devions nous arrimer à MIR pour transférer du matériel et surtout faire une rotation d’équipage, entre Dave Wolf et Andy Thomas.


Mon rôle a été de filmer et de photographier la phase d’approche d’Endeavour et l’arrimage avec MIR. J’étais juste derrière le commandant de bord Terry Wilcutt. C’était très impressionnant de s’approcher comme cela de MIR.
J’ai fait beaucoup  photos – j’ai reçu aussi une formation de cartographie et cela m’a été bien utile lors du vol.


Comment s’est passé le retour sur Terre ? Etiez-vous triste de rentrer ?
Tout en douceur ! Avec la navette, c’est vraiment très agréable ! le retour en Soyouz est bien plus ‘’sportif’’ (Rires…).

J’étais triste de rentrer car je voulais que mon rêve se prolonge un peu plus, mais aussi content à la fois, car je savais que j’allais revoir ma femme, ma famille, mes amis, dont certains que je n’avais pas vu depuis longtemps à cause de la préparation de cette mission.


Une petite dernière question : Quelle(s) différence(s) avez-vous ressenti entre ce vol courte durée en navette et votre vol longue durée vers l’ISS par un Soyouz ? Vous avez effectué deux EVA - quel(s) souvenir(s) en gardez-vous ?
C’est d’abord une sacrée aventure. Presque deux mondes différents !

MIR était notre station, à nous les russes, et la Station Spatiale Internationale est la station, non plus d’une nation, mais de plusieurs. En peu de temps, cela à complètement changé notre perspective.

La navette nous envoyait en orbite de façon bien plus ‘’douce’’ que le Soyouz, et nous ramenait sur Terre aussi de façon plus douce, mais c’était un véritable bonheur de décoller et d’atterrir avec un Soyouz !

(Soyouz TMA-5 qui emmène Expedition 10 vers l'ISS)

Pour un vol court, les journées de travail sont très intenses. Sur un vol long, on a plus de travail évidemment, mais celui-ci est réparti dans le temps, donc c’est beaucoup plus facile à gérer, même si nos journées étaient longues. 
Puis nous n’étions que deux (ndlr = accident de Columbia et reprise des vols vers l’ISS par la navette qu’à partir de juillet 2005), donc un peu plus de travail pour nous.

Mes deux EVA sont des moments extraordinaires, intenses, dont je me rappellerai toujours. Malgré le travail à effectuer, j’ai adoré regarder la Terre vue de haut !


Crédit : Stéphane Sebile / Spacemen1969
             Space Quotes - Souvenirs d'espace
Remerciements à l'Association of Space Explorers (ASE) et à la Cité de l'Espace à Toulouse



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire